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Table ronde nationale sur lenvironnement et lconomie
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Les marchs financiers et la durabilit : Investir dans un avenir durable

Avant-propos*

Nous ne voyons pas ncessairement de contradiction entre, d'une part, une conomie canadienne concurrentielle et mene par l'innovation et, d'autre part, l'occasion de renforcer la durabilit des entreprises canadiennesi. Nous n'avons gure plus besoin d'tre convaincus de l'aspect fondamental des risques de l'environnement, de la gouvernance, et des aspects sociaux et thiques pour la rputation des entreprises canadiennes, ni de la pertinence de ces risques pour les investisseurs nationaux et internationaux ii. Toutefois, en recherchant des scnarios gagnants pour tout le monde dans ce domaine, nous ne voyons pas la ncessit de renforcer la rglementation, la taxation, ni l'interfrence dans les activits normales des entreprises canadiennes qui sont source de valorisation.

Dans nos dlibrations sur les questions souleves par les travaux du Groupe de travail sur les marchs financiers et la durabilit de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'conomie, trois thmes principaux sont ressortis comme tant essentiels la ralisation de rsultats optimaux pour la comptitivit conomique de l'industrie canadienne, les politiques de dveloppement durable de tous les niveaux de gouvernements au Canada et les valeurs des Canadiens. Ces thmes se rsument comme suit : a) le besoin de rglementer efficacement les services financiers, tout
particulirement d'liminer les obstacles perus et rels aux mouvements de capitaux que pose la complexit du partage des comptences; b) la ncessit d'amliorer le contexte fiscal pour inciter les entreprises investir dans la technologie et l'efficience, ainsi que pour favoriser la croissance des entreprises; c) l'importance de renforcer la divulgation et la transparence de ce que les autorits juridiques, comptables et rglementaires, ainsi que les marchs financiers commencent reconnatre, pour
les entreprises et leurs investisseurs, comme des sources de risques nouveaux- y compris les enjeux sociaux et environnementaux.

Facteurs propres au Canada

Nous avons tenu compte de plusieurs facteurs contextuels propres la situation du Canada dans l'laboration de notre commentaire destin cet avant-propos. Ces facteurs sont les suivants :

  • Les ressources naturelles et le secteur financier occupent une grande place dans les bourses canadiennes, qui sont une destination de choix dans le monde pour les investissements dans les ressources et qui sont par consquent particulirement sensibles aux politiques publiques et aux ractions du public que suscitent les industries de l'extraction et des enjeux tels que les changements climatiquesiii. Paralllement, notre secteur des services financiers a t srieusement clabouss dans les rcents scandales de gouvernance.
  • Les systmes canadiens de rglementation financire- y compris les fonds de pension, les valeurs mobilires, le secteur bancaire et le secteur de la rglementation des assurances- sont beaucoup plus fragments que dans d'autres paysiv. Les rgles varient d'un organisme de rglementation l'autre, et demandent beaucoup de temps aux entreprises et investisseurs qui doivent suivre tous ces mandres. La confusion est particulirement grande parmi les investisseurs externes (c.--d. internationaux).
  • Les microentreprises canadiennes et les entreprises petite capitalisation reprsentent un nombre particulirement lev parmi toutes les socits cotes en bourse. Ce facteur, qui comporte plusieurs implications pour les politiques publiques, exige un discernement particulier dans les dbats sur les exigences de production de rapports, entre autres, qui demandent beaucoup de ressources et que ce genre d'entreprises sont censes respecter.
  • Une trs faible proportion de rgimes de pension canadiens sont actifs dans le financement d'oprations risque, surtout par rapport aux rgimes de pension amricains. En fait, les investisseurs canadiens, tant titre individuel qu'institutionnel, semblent avoir gnralement peu de tolrance au risque.
  • Les dpenses du Canada consacres la recherche et au dveloppement (R&D) proportionnellement au PIB, sont relativement faibles par rapport celle des autres pays de l'Organisation de coopration et de dveloppement conomiques (OCDE)- malgr certains des incitatifs fiscaux favorables la R&D qu'offre le Canada.

L'analyse suivante de nos trois principaux thmes- efficience rglementaire, amlioration des incitatifs fiscaux et renforcement de la divulgation de renseignements- dbouchera sur plusieurs possibilits essentielles que le Canada pourrait explorer.

Efficience rglementaire

Nous sommes convaincus que la nature actuelle de la rglementation financire au Canada, qui est aussi fragmente que confuse, constitue un cot net pour les entreprises canadiennes et leurs investisseurs et, par le fait mme, entrave srieusement l'efficience et, par ricochet, la durabilit de ces entreprises. Par exemple, il n'est pas controvers d'affirmer que les entreprises du secteur des ressources naturelles sont importantes pour la comptitivit et la productivit du Canada et qu'elles reprsentent une source importante d'investissements autocentrs. Nous pouvons galement affirmer que les entreprises minires, ptrolires et gazires du Canada sont en train d'adopter des innovations technologiques de pointe qui favorisent, la fois, l'efficience et la durabilit long terme.

En consquence, il semble peu sens de semer la confusion dans l'esprit des investisseurs trangers avec des inscriptions provinciales la cote officielle qui soient en concurrence, ou avec des exigences rglementaires non harmonises pour ces entreprises; en fait, ceci ne servira qu' entraver les mouvements de capitaux. Nous sommes donc d'accord avec le gouverneur de la Banque du Canada, David Dodge selon qui il ne sert rien que le Canada ait une rglementation des valeurs mobilires diffrentes selon la provincev . Le rapport Blueprint for a Canadian Securities Commissionvi prpar par un groupe national, prsid par Purdy Crawford, contribue faire voluer le dbat au-del du besoin d'un systme national, en formulant des recommandations pour vritablement concevoir et mettre en uvre un seul organisme de rglementation des valeurs mobilires.

De mme, nous reconnaissons que les rgimes de pension reprsentent une vaste ressource, pas assez exploite, de financement de capitaux de risque et de petites et moyennes entreprises (PME). Nous reconnaissons galement que ce sont l des occasions de faire le lien entre ce financement et des questions de durabilit qui intressent les rgimes de pension et leurs fiduciaires. Il est ici noter que les investisseurs institutionnels canadiens sont beaucoup moins exposs que leurs homologues amricains au march boursier privvii. Ce phnomne a t attribu des obstacles institutionnels, tant perus (par exemple, cause du manque d'exprience et du souvenir des pitres rendements des annes 1980); que rels (par exemple, les normes d'valuation de la suffisance du capital dictes par le Bureau du surintendant des institutions financires, normes selon lesquelles les mises en rserve de capitaux propres privs sont beaucoup plus importantes pour les actions prives que pour la dette prive). Il ne faudrait pas dissuader les investisseurs institutionnels de s'engager sur le march des souscriptions prives.

Nous remarquons que les chercheurs- dans une tude mene par l'Universit York (Canada) et l'Universit Kingston (R.-U.) sur les vertus comparatives de la politique publique britannique et canadienne en matire de rgimes de pension et de transparence sur les questions de durabilit- ont repr l'un des principaux obstacles la rforme comme tant la nature fragmente de la rglementation des pensions au Canadaviii. L encore, ce constat dmontre comment l'inefficacit de la rglementation risque de porter plus ou moins gravement atteinte aux intrts des investisseurs sur le plan de la transparence et de la durabilit.

Il vaut la peine de signaler que le Canada est le seul pays au monde ne pas simplifier sa rglementation des services financiers. Ceci reprsente manifestement un obstacle important qui pourrait prendre plus d'importance et devenir dterminant pour la comptitivit et la durabilit conomique de notre pays. Nous risquons fort de manquer de stratgie et de faire preuve d' esprit de clocher dans un monde qui exige que l'on labore des politiques beaucoup plus stratgiquesix.

Amliorer les incitatifs fiscaux

Le Canada est un pays trs concurrentiel et relativement riche sur le plan mondial; en fait, il se classe deuxime aprs les tats-Unis parmi les pays les plus prospresx. Toutefois, l'cart entre la prosprit amricaine et canadienne persiste. En fait, cet cart de prosprit, qui se situait 3 200 $ du PIB par habitant en 1981, est pass 8 700 $ du PIB en 2004 xi. Ce saut norme a t surtout attribu la moins grande productivit et, en partie, des questions relatives aux marchs financiers. Nous reconnaissons qu'il n'y a pas de pnurie gnrale de capitaux au Canada. Mais au Canada, les dpenses en immobilisations ont parfois t leves, et la disponibilit de capitaux n'a pas
toujours t suffisante pour stimuler une croissance grande chelle des entreprisesxii.

Par rapport aux tats-Unis, le taux marginal d'imposition pour le capital et la main d'uvre est prs de deux fois plus lev. Ainsi, les entreprises canadiennes sont particulirement dtournes d'investir des capitaux, ce qui veut dire que les entreprises sont plus susceptibles d'acheter plus de main-d'uvre que d'investir dans la machinerie ou l'quipement neufsxiii. Nous sommes d'accord avec David Emerson, ministre du Commerce international responsable de la Pacific Gateway et des Jeux olympiques Vancouver Whistler, qui, en septembre 2005, a attir l'attention sur la nature peu concurrentielle du systme fiscal des entreprises du Canada. Une faon de relever ce dfi serait de diminuer les pnalits fiscales qui s'appliquent aux investissements de capitaux- pour prcisment garantir que l'imposition des entreprises et des capitaux, y compris l'impt sur les plus-values, demeure concurrentielle et, surtout, pour favoriser la croissance de jeunes entreprises novatrices et la transition concurrentielle des entreprises traditionnelles par rapport aux tats-Unisxv.

Renforcer la divulgation

Une recherche recommande par le Groupe de travail l'Institut canadien des comptables agrs (ICCA) a retenu la partie des rapports annuels consacre au rapport de gestion comme le moyen le plus appropri de reprer et de mettre en relief les sources de risques nouveaux pour les entreprises et leurs investisseurs, y compris les risques lis aux enjeux sociaux et environnementaux xvi. Nous remarquons galement que l'ICCA a recommand un ventail d'options de politiques qui pourraient favoriser des changements dans la divulgation de renseignements par les socits. Selon nous, toutefois, ce qui s'impose pour les entreprises et leurs investisseurs, c'est une divulgation meilleure et plus claire des risques nouveaux, et rien de plus. Il existe des preuves empiriques dmontrant que l'valuation des entreprises peut-tre influence par la performance sociale et environnementalexvii; les investisseurs tiennent galement compte de ces risques de manire explicite dans leurs portefeuilles d'investissement xviii. Donc, la vraie question consiste savoir comment s'assurer que l'information sur laquelle ces phnomnes sont bass soit la fois exacte et pertinente. Reconnatre les sources nouvelles de risque et y ragir bon escient constituent peut-tre, tant pour les analystes que pour leurs clients, des occasions de sensibilisation et de rayonnement. Ceci permettrait d'amliorer l'efficacit du fonctionnement des marchs et, en fait, n'irait nullement l'encontre de l'obligation actuelle des conseillers financiers de renseigner les clients sur les facteurs qui pourraient porter atteinte leur portefeuille.

Nous comprenons certes qu'il existe des preuves que, lorsqu'un investisseur individuel commence s'intresser davantage aux investissements personnels et la gestion de son portefeuille, il s'intresse aussi davantage la nature des entreprises dans lesquelles il investit. Nous suggrons nanmoins qu'exiger plus d'informations pertinentes sur les sources de risques et dbouchs nouveaux que reprsentent les investissements canadiens aurait peut-tre un effet intrinsquement positif sur la disponibilit de capitaux pour des entreprises plus durables l'avenir.

Principaux dbouchs

Nous croyons que le point de contact essentiel entre la comptitivit de l'conomie canadienne, aujourd'hui et l'avenir, et les questions de durabilit se situent au niveau de l'innovation. Nous faisons donc ici rfrence l'innovation en termes d'efficience et de productivit ainsi qu'au recours judicieux la technologie et l'investissement de capitaux.

Bon nombre des entreprises importantes au Canada sont dj actives dans le domaine de l'efficience et des pratiques optimales qui donnent des rsultats positifs sur le plan conomique, social et environnemental. Ces entreprises sont l'honneur dans plusieurs classements, que ce soit sur le march boursier ou autrement, qui reconnaissent la performance leve en matire de valeur ajoute pour la durabilit et l'conomie. Mais c'est l un programme long terme qui consiste galement crer les conditions qui permettraient l'mergence des produits et services de demain. Heureusement, certaines de nos meilleures entreprises d'aujourd'hui explorent activement les dbouchs d'entreprises durables de l'avenir, y compris les technologies d'nergie de
substitution, la biotechnologie ou la nanotechnologie.

Il est aussi une catgorie spciale d'activit industrielle que les marchs financiers canadiens doivent galement alimenter et favoriser. Nous faisons ici rfrence au dmarrage d'entreprises, aux nouvelles entreprises et aux entreprises durables de haute technologie de demain. L'un des plus gros dfis pour le Canada consiste veiller ce que la croissance de cette troisime catgorie ne soit pas sape par des obstacles structurels mentionns au dbut de cet avant-propos.

Nous croyons que les initiatives dans les domaines des principaux dbouchs suivants contribueraient promouvoir la comptitivit, la capacit d'innovation et la durabilit de l'conomie et des entreprises canadiennes :

1) Efficience de la rglementation

Nous suggrons de simplifier la rglementation des services financiers dans l'ensemble du Canada, qui ne relveraient plus que d'un seul organisme de rglementation de la conduite des marchs et d'un seul organisme de rglementation prudentielle. Ceci amliorerait l'efficience des marchs capitaux canadiens en gnral et, par consquent, la durabilit conomique des entreprises canadiennes.

2) Amlioration des incitatifs fiscaux

Nous suggrons d'amliorer les incitatifs fiscaux pour l'investissement, surtout en ce qui concerne l'objectif de croissance de l'entreprise, mais aussi dans le domaine de la recherche et du dveloppement, de la technologie de l'information et du capital humain pour toutes les entreprises. Il s'agirait, entre autres, de rduire l'impt des entreprises et l'impt sur le capital, d'acclrer l'amortissement des investissements de capitaux pour amliorer la comptitivit, et d'accrotre la probabilit d'investissement dans les technologies et comptences favorables l'environnement et la socit.

3) Renforcement de la divulgation

Nous suggrerions une exigence de divulgation plus claire et meilleure des risques nouveaux dans la partie des rapports annuels qui porte sur le rapport de gestion, ce qui son tour faciliterait la transparence relative aux aspects sociaux et environnementaux pour ce qui concerne les investisseurs individuels, et une divulgation plus efficace de la gestion des questions de durabilit par les rgimes de pension et d'autres investisseurs institutionnels.

4) Travaux futurs de recherche

Il serait opportun d'intensifier les travaux de recherche sur les effets dtaills de l'ensemble de nos recommandations. Nous suggrons galement d'autres recherches sur les effets des interventions d'amlioration lgitime des marchs par le gouvernement. Par exemple, la politique d'approvisionnement gouvernemental pourrait-elle jouer un rle dans ce domaine? De mme, il faudrait tenter de mieux comprendre comment les marchs financiers rpondent aux nouvelles sources d'information sur les risques nouveaux pour que l'information puisse tre prise en compte dans le prix des actions.

Auteurs :

David Brown, ancien prsident, Commission des valeurs mobilires de l'Ontario

Steve Foerster, directeur du programme de MBA, professeur de finances, Richard Ivey School of Business, Universit de Western Ontario

Roger Martin, doyen, Rotman School of Business, Universit de Toronto; directeur, AIC Centre for Corporate Citizenship

Snateur Hugh Segal, chercheur principal, School of Policy Studies, Universit Queen's

*Les opinions exprimes dans l'avant-propos sont celles de ses auteurs et ne refltent pas ncessairement celles du Groupe de travail ou de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'conomie.

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